28/03/2008

La Théorie des cordes / José Carlos Somoza


C'est la toute première fois qu'en me lançant dans un bouquin, je me suis fait la réflexion que, tout compte fait, j'aurais préféré ne rien connaître de l'histoire et me laisser ainsi entraîner par la découverte au lieu d'anticiper sur le résumé que j'en avais lu. C'est le problème parfois avec la quatrième de couverture. Elle n'est qu'une fenêtre, une lucarne qui ne laisse pas voir l'étendue d'une aventure et de son traitement, quand on ne la cantonne pas aux sphères de notre imagination. Rien de plus normal, après tout.

Mon intention n'est pas d'effectuer une pirouette afin d'éviter de me lancer dans un résumé ou de rédiger une chronique trop longue qui vous dissuaderait de la lire en entier ( fainéant, le BiblioMan(u)...hum?), mais plutôt de vous préserver de l'intrigue, qui mérite vraiment d'être explorée de manière tout à fait personnelle.

A la rigueur, sachez seulement que des canevas romanesques qui auraient pu s'avérer des plus classiques, José Carlos Somozà s'en dédouane aisément en dressant une histoire qui ne va jamais là où l'on aurait pu l'attendre. Il ne s'attarde pas sur des aspects que l'on aurait aimé plus fouillés ? Quand bien même! Il nous emmène dans un ailleurs tout aussi passionnant, pétri de passages réellement haletants.
Ne serait-ce que pour ces raisons, n'hésitez pas à vous jeter dans la théorie des cordes, roman érudit et mystérieux par excellence, et de vous y abandonner complètement. Essayez - si c'est à la lampe de chevet c'est encore mieux -, vous m'en direz des nouvelles.

16/03/2008

Malabar Trip / Cyril Montana


Long monologue écrit dans une langue volontairement branchée, ponctuée d'argot et de verlan, une langue que d'aucuns qualifieraient de "jeun's", Malabar trip raconte les tribulations d'un gars emmenant sa belle en Corse à dos de scooter.
Au-delà d'une simple description de déboires humoristiques sur la route des vacances, Cyril Montana dépeint la jeunesse des boulots précaires, toujours sur la corde raide, comptant ses sous encore et encor(s)e avant d'aller trouver le banquier pour des négociations infamantes ; une jeunesse déboussolée trouvant refuge tant bien que mal dans le sexe, le shit et l'alcool ; une jeunesse de la survie "au jour le jour".
Malheureusement, si les deux premières pages croustillantes à souhait (lisez-les, vraiment !) laissent présager une heureuse activité des muscles zygomatiques, et si le livre se lit presque d'une traite, il ne reste à la fin qu'un "Bof ; ouais, bof". Et puis on passe sans conserver grand chose de cette histoire.
Car, il faut bien le dire, la succession des scènes en Corse sont drôles mais sans plus, et les digressions du narrateur sur ses diverses expériences sexuelles, ainsi que les questionnements qu'elles suscitent ne sonnent jamais juste, oscillant sans cesse entre la gentille provoc' et une certaine morale à préserver.

Il ne vous reste donc plus qu'à lire les deux premières pages (décidément j'insiste) et...plus si affinités.

12/03/2008

Le Chat dans le cercueil / Koike Mariko

Si vous aimez le rythme lent, posé, très esthéthique de la littérature japonaise, n'hésitez pas à lire "Le chat dans le Cercueil".
Ce roman dit "policier" sort du registre des polars occidentaux. En effet les codes culturels sont si différents de nous autres, qu'il ne faut pas vous attendre à du suspens, de l'action ou bien à un roman noir.
C'est somme toute une histoire banale empreinte de fantastique, telle que pouvait l'écrire Edgar Poe ou Maupassant.
L'auteur Koike Mariko nous conte l'histoire dans le Japon d'après guerre, d'un homme veuf depuis peu, de sa fille qui n'a pour toute amie qu'une chatte se prénommant Lala et de leur jeune fille au pair. Une intrus va s'immiscer dans leur vie par l'intermédiaire du père qui n'a d'yeux que pour elle.
Ce quatuor vit avec des vérités cachées qui vont les mener jusqu'à la tragédie.
L'auteur créé ici une atmosphère psychologique qui vous oppresse et vous sublime à la fois.
Pour ceux qui deviendraient adeptes de cette littérature, je vous conseille de lire aussi Edogawa Ranpo.

10/03/2008

Les Intrus / Michael Marshall


Ecrivain presque accidentel d'un seul livre, Jack whalen a quitté la police de Los Angeles pour se retirer avec sa femme, Amy, dans une petite ville de la côte nord du Pacifique. Tout irait bien dans le meilleur des mondes si Jack ne se plantait pas tous les jours devant son ordinateur, sans grande conviction, sans réelle envie non plus, en attendant que les mots et l'inspiration viennent à lui. Et puis, il y a ce coup de fil de Gary Fisher, une connaissance du lycée, vite côtoyée, vite oubliée, qui remet toute son existence en cause. Gary lui demande en effet, au nom de leur ancienne amitié, de résoudre une affaire pour le cabinet d'assurances qu'il représente. Dans le même temps, la femme de Jack ne donne plus signe de vie et il semblerait qu'elle ne lui ait pas tout dit sur son passé.
Avant de devenir un auteur de frileurs best-sellers, Michael Marshall (Smith) donnait dans la science-fiction avec son nom complet. Aujourd'hui, certains de ses anciens romans sont bizarrement reparus dans des collections policières. A croire qu'il se vend mieux ainsi.
Il est vrai que la trilogie Les Hommes de Paille était réellement passionnante dans son genre. Un bon rythme, une histoire prenante, des révélations savamment dosées et des rebondissements tombant à point nommés. Bref, du bon frileur qui confirme que tout best-seller n'est pas forcément synonyme de navet littéraire comme le faisait si bien remarquer un chasseur de têtes de ma connaissance (cf. les commentaires sur la chronique du premier opus de Millenium.)
On retrouve la même énergie dans Les Intrus, et c'est ce qu'on peut d'ailleurs lui reprocher, avec le manque d'originalité ainsi que de menus détails qui sapent un peu le plaisir.
Par exemple, Marshall décrit d'emblée le narrateur comme un gars ordinaire, voire insignifiant, qui a conscience de cet état. Lorqu'il était étudiant, c'était un passe-partout. Flic, il en allait de même et ça lui convenait parfaitement ainsi. Et puis tout à coup, sans aucune transition, on se retrouve avec un type qui prend les choses en main, va à l'encontre des conflits, devient un véritable gros dur à qui il ne faut pas en conter. Bizarre...Avec le recul, c'est comme s'il n'y avait plus de différence entre le héros des Hommes de paille et des Intrus.
Autre détail, mais qui peut devenir profondément irritant : le nombre de coquilles, de mots manquants, d'accents non appropriés, ou de fautes d'orthographes (ça fait beaucoup, hein ?) qui ponctuent le récit et qui laissent entrevoir l'attention que les éditions M.Lafon portent à leurs ouvrages, surtout quand on sait qu'il ne s'agit pas d'un cas isolé. Je ne m'étendrai pas sur les politiques éditoriales des uns et des autres mais....allez, je me cantonne aux points de suspension et je reviens au livre.
Au final, donc, Les Intrus reste un roman agréable à lire mais sur lequel on ne se précipite pas le soir en rentrant du boulot et qui, j'en ai peur, risque d'être vite oublié. Par conséquent, lisez plutôt les Hommes de Paille et il se pourrait bien que vous preniez une journée de repos une fois le livre commencé. Qui a parlé de se faire porter pâle ? Tssss.....

06/03/2008

Chroniques des ombres / Pierre Bordage


Je serais bien en peine de chroniquer l'ensemble des Chroniques des ombres. La raison en est bien simple, je n'ai pas fini de l'écouter. L'écouter ? De quoi il parle, le BiblioMan(u),là ? Il aurait pas un peu trop serré son masque derrière les oreilles hier soir ? La nuit a été longue de lectures perturbantes ? Tsss, tsss, tsss...que nenni. Je vous parle bien d'une aventure audio que je ne saurais trop vous inviter à découvrir.
S'il m'a été impossible d'aller jusqu'au bout, c'est tout simplement parce que cette histoire captivante (pour les amateurs du genre, j'en conviens...mais pourquoi pas aux autres, après tout) ne paraît qu'à raison d'un épisode par semaine, et que la première saison ne se terminera qu'en novembre 2008. Mais les débuts sont d'ores et déjà prometteurs. L'ambiance sonore (musique, bruits de portes, brouhahas ambiants, pages feuilletées) ainsi que les voix des comédiens incarnant chaque personnage sont autant d'invitations à l'évasion. Tout est fait (et bien fait)pour vous immerger rapidement dans cette histoire dont on ne peut qu'attendre la suite...avec impatience.
Un concept d'émission radiophonique, donc, remis au goût du jour, et qui fonctionne encore à merveille. En tout cas, en ce qui me concerne, j'adhère complètement à ce genre d'initiative. Les éditions Librio s'étaient déjà essayées à l'exercice des épisodes (en format papier) avec La Ligne verte de Stephen King d'abord, puis avec Les Derniers hommes de Pierre Bordage (encore lui!). Le fait d'attendre la suite de l'intrigue avait quelque chose d'excitant, donnait une dimension supplémentaire à l'acte de lecture.
Donc, allez-y, n'hésitez pas, d'autant que les 4 premiers préambules sont à télécharger gratuitement à partir du site des chroniques des ombres ou des éditions mp3minutes qui ont fait là du bien beau boulot, tout en étant prêt à renouveler l'expérience en développant l'offre éditoriale. A suivre, donc...

02/03/2008

L'Espace de la révélation / Alastair Reynolds



Deuxième tentative pour celui-ci. Lors de sa sortie française, en 2002, j’avais abandonné au premier quart en prétextant un " pas envie de lire du space opera tout compte fait ". J’avais gardé l’histoire en tête en me disant que j’y reviendrai sans doute à un moment plus propice. Et puis l’autre jour, une grosse envie de lire du space op m’a étreint en plein travail. Je vais en librairie. Je flâne…et je constate amèrement de visu que ça devient vraiment difficile d’en trouver. On sait que la fantasy se fait une place au soleil dans les rayons. Les gens y trouvent leur plaisir. Tant mieux ! Mais ceux qui cherchent du space op, c’est une autre affaire. Quand on en a déjà lu un certain nombre, qu’on recherche de la nouveauté, on se trouve confronté à : 1. des auteurs avec lesquels on n’accroche vraiment pas, 2. du hard-science de chez hard-science, 3. du léger de chez léger agrémenté de coquilles et de contre-sens que c’en est navrant, 4. l’absence de nouveautés.
Du coup, fort de cette constatation, je me suis rabattu sur l’Espace de la révélation, en me disant que cette fois-ci, ce serait peut-être la bonne.
Ben non.
Trois intrigues se superposent avant de converger enfin : lors de fouilles, Dan Sylveste met au jour une civilisation extra-terrestre aujourd’hui disparue pour d’obscures raisons ; Khouri, assassin professionnelle se voit engager pour une obscure mission ; Volyova est à bord d’un vaisseau à l’armement obscur.
On l’aura compris, ce livre est obscur à plus d’un titre. Peu engageant, mis à part pour les fans de hard-science qui sauront y trouver leur compte. Dommage car on se laisse tout de même emporter au départ mais les personnages restent fades (défaut récurrent aux ouvrages de hard-sf), ne parviennent jamais à nous surpendre, on a vraiment du mal à se représenter les scènes ou les objets décrits et finalement, c’est long, trop long…

Delirium tremens / Ken Bruen



Alors que j’étais lancé dans la lecture de Delirium tremens, un ami m’a demandé ce que je lisais en ce moment. Je lui ai raconté l’histoire en quelques mots. En le faisant, je me suis rendu compte que le récit que j’en faisais ressemblait à bon nombre de polars et, rendu ainsi, ça ressemblait effectivement au stéréotype du roman noir : un héros, ancien flic devenu détective privé, accroché à sa ville comme à l’alcool, reçoit la visite d’une femme lui demandant d’enquêter sur la mort de sa fille camouflée en suicide.
C’est vrai, des écorchés vifs, on en trouve beaucoup en littérature policière : le Rebus de Rankin, le Matt Scuder de Block, le Bosch de Connelly…et le Jack Taylor de Bruen, pour ne citer qu’eux. Mais cet aspect n’est pas gênant pour autant car ce qui les différencie les uns des autres, c’est la manière dont les auteurs traitent leurs histoires, et le style qui va avec. Je m’étais déjà fait la réflexion – à propos de Avocat criminel de David Cray ou de Ténèbres, prenez-moi la main de Dennis Lehane – à savoir que les histoires n’avaient franchement rien d’original, mais quelle claque à la lecture, vraiment !
Du style, Delirium tremens n’en manque pas. C’est même sa principale qualité. Des chapitres courts, des dialogues percutants, comme on dit. Jack Taylor se noie dans la première enquête qu’il nous livre, comme il se noie dans l’alcool, personnage à part entière et omniprésent du roman.
Pour ne rien gâcher, Ken Bruen ponctue l’histoire de références de livres (policiers pour la plupart, récents ou non), sans jamais être un frein à la lecture comme c’est le cas pour la physique des catastrophes, de Marisha Pessl, déjà chroniqué ici. Et l’on trouve même des phrases qui font écho : j’étais devenu un bibliophile dans le vrai sens du terme. Je n’aimais pas seulement lire, j’aimais les livres eux-mêmes. J’avais appris à en apprécier l’odeur, la reliure, d’impression, le contact des ouvrages entre mes mains.[…] Quand j’aimais l’apparence et le contact d’un livre, je me mettais à le lire.
En ce qui me concerne, il en sera sans doute de même pour la seconde aventure de Jack Taylor : Toxic Blues, car la griffe de Ken Bruen laisse des traces, à tel point qu’une fois le livre refermé, on a envie de savoir ce que va devenir ce bougre d’irlandais.