23/02/2011

C'était demain / Karl Alexander

Il y a peut-être deux ans de ça, après avoir rempli mon adhésion à la FSHW, la Fédération des Super-Héros du Web, j'ai reçu dans ma boîte aux lettres leur guide énonçant les conseils à suivre et ne pas suivre. Et dedans il y a l'article 4. de la rubrique « identité et partage ». Article qui stipule : « évitez autant que faire se peut de vous raconter, de donner des éléments constitutifs de votre vie civile, surtout si vous n'avez pas de super pouvoirs, cela pourrait s'avérer fâcheux. Se dévoiler, c'est prendre le risque d'attaques malveillantes ou d'intrusions répétées dans votre cercle familial ou privé. » Jusqu'à présent, à une ou deux petites exceptions près sans grandes conséquences, j'ai toujours suivi à la lettre ces prérogatives. Mais là... là, comment passer outre ? Comment parler de C'était demain sans remonter en arrière – après tout c'est une histoire de voyage dans le temps, non?

Pour autant, ce n'est pas la peine que vous preniez des notes, ni que vous me réclamiez par la suite quelques euros d'honoraires, je ne vais pas non plus m'allonger sur un canapé binaire. Disons que je vais juste m'y asseoir, hein, ce sera plus près de la vérité.

Octobre 1985. Retour vers le futur sort sur les écrans français. C'est une claque pour l'adolescent que je suis et qui découvre peut-être pour la première fois une histoire de voyage dans le temps. L'éventail des possibles paraît proprement hallucinant.

Août 1986. En vacances, je tombe sur un vieil Historia (le n°414 pour être précis, datant de mai 1981) consacré à Jack L'éventreur. Un dossier constitué par Alain Decaux qui revient sur les faits et sur le mystère entourant l'identité du célèbre serial killer. Il laisse supposer que les scellées concernant ce dossier devant permettre d'y voir plus clair seraient enlevées vers 1999. C'est raconté d'une telle manière que la curiosité ne peut être que piquée.

Et puis vient juillet 1988. Je vois le film C'était demain. Une nouvelle claque, au point d'utiliser l'histoire pour une rédaction au collège quand nous travaillions sur la science-fiction et le fantastique. Mon seul et unique plagiat. Raté, pour ceux que ça intéresse. En tout cas, la réception de la note me valut une belle montée d'angoisse et la mise en branle de l'imagination quant à l'annonce qu'il faudrait en faire.A l'époque je ne savais pas que le livre existait, je ne savais donc pas non plus que l'auteur, Karl Alexander avait lui-même scénarisé le film. A l'époque, il ne fallait pas me parler de livres.

Fin de l'épisode revival.

Maintenant, la donne n'est plus la même, mais ce n'est pas sans une certaine appréhension non plus que j'ai ouvert ce livre. Est-ce que je n'avais pas trop magnifié cette histoire à l'époque ? Est-ce que mon regard à moi n'aura pas trop changé ? Est-ce que le bouquin n'aura pas trop vieilli ? Après tout il date de 1979...

Non. Oui forcément. Un peu mais qu'importe. Voilà, dans l'ordre les réponses à ces questions.

Première constatation : Karl Alexander a fidèlement, très fidèlement, retranscrit son histoire. à l'écran. Celle d'un Herbert George Wells ayant mis au point une machine à voyager dans le temps qu'il est contraint d'utiliser, non pas pour convaincre un auditoire de l'étendue de sa science, mais pour poursuivre Leslie John Stephenson, alias Jack l'Eventreur. Wells a en effet invité plusieurs personnes de sa connaissance pour leur révéler son invention quand la police frappe à sa porte. Elle a remonté la trace de l'assassin qui, pour lui échapper, n'a pas d'autre choix que de se propulser en 1979... à San Francisco.

A n'en pas douter Karl Alexander s'amuse beaucoup. S'il n'a pas le souci de la vraisemblance – il ne s'embarrasse pas d'explications scientifiques quant au fonctionnement de la machine à voyager dans le temps – il a néanmoins celui de divertir le lecteur, sans pour autant céder à la facilité. Tout juste emprunte-t-il à une ou deux reprises des raccourcis un peu abrupts dont je ne peux dévoiler la nature ici. Ce qui l'intéresse, c'est plutôt de projeter un homme dans le futur, de le soumettre à une observation puis de dresser le constat d'une évolution comportementale. Au début du roman, H.G. Wells est en effet convaincu que la science, la technologie et le savoir, pourvoiront à la plénitude sociale, au meilleur des mondes. Son voyage va se charger de lui remettre les pendules à l'heure.

Là d'où je viens, je suis un monstre, ici je suis un amateur, affirme Jack l'Eventreur.

On ne peut être plus clair.

Karl Alexander n'investit pas le champ des paradoxes temporels. A peine les effleure-t-il pour les besoins de son récit dont le déroulement s'avère sans temps mort. A aucun moment, je ne me suis lassé des découvertes du Wells pétri de naïveté, ni des prises de conscience qui en ont découlé, toutes auréolées du sourire du lecteur du XXIème siècle tant les situations ont pu s'avérer cocasses...

Comme lorsque j'ai vu le film pour la première fois, comme dans toute bonne histoire de voyage dans le temps qui se respecte, l'envie était là de donner des directives aux personnages – quoique ce ne soit pas la peine pour ce qui est de subjuguer les femmes, pour ça, les manières désuètes opèrent à merveille. L'envie était là de leur dicter la voie à suivre plutôt que de s'empêtrer dans des complications dont ils pourraient se défaire sans aucune diff... enfin, en faisant un peu attention. Bizarre quand même quand on y pense, cette envie de vouloir toucher à tout parce que là, en ce qui concerne C'était demain, la place du lecteur est on ne peut plus confortable et enthousiasmante.

Tiens d'ailleurs, ça me fait penser qu'à l'automne 1993, en octobre si je ne me trompe pas, à moins que ce ne soit en novembre, enfin bref, ce n'est pas vraiment important parce que de toute façon, j'avais bien pris soin de [suite de la chronique supprimée en raison d'une modération de secours de la FSHW, conforme à l'article 6 de la rubrique « identité et partage »]

A voir aussi en ligne l'avis des Habitants de l'avenue...
CITRIQ
C'était demain, Karl Alexander, traduction de Jean-Pierre Carasso, révisée par Julien Bétan, Mnémos (Dédales), 248 p.

19/02/2011

Hypothermie / Arnaldur Indridason, texte lu par Jean-Marc Delhausse

Maria, la cinquantaine, est retrouvée pendue dans son chalet d'été au bord du lac de Thingvellir. Il s'agirait d'un suicide. C'est en tout cas ce à quoi conclut la police après une autopsie ne laissant aucune place au doute. D'après les premiers éléments de l'enquête, Maria était dépressive. Elle avait très mal vécu la mort accidentelle de son père alors qu'elle était enfant, puis celle plus récente de sa mère, emportée par la maladie. Une mère qui dans ses derniers instants, lui avait promis de lui adresser un signe une fois qu'elle serait passée... de l'autre côté. Car Maria était de nature angoissée, redoutait la mort, s'interrogeait beaucoup sur l'au-delà. Personne, pas même son mari ne fut réellement surpris par son décès. Personne hormis Karen, sa meilleure amie, persuadée que Maria ne se serait jamais suicidée. Karen, qui dispose d'une cassette susceptible d'intéresser le commissaire Erlendur : une conversation de Maria avec son médium.

A la lecture d'Hiver Arctique, j'avais été impressionné par la maîtrise du récit dont faisait preuve Arnaldur Indridason, épaté par sa manière de combiner la forme et le fond, de révéler les problèmes identitaires de la société islandaise. Avec Hypothermie, maîtrise et efficacité sont toujours là, et j'ai pour ma part été une nouvelle fois impressionné par ce travail d'orfèvre. D'autant que l'auteur part de rien, d'une situation dont on se demande bien comment il va tenir sur la longueur: il n'y a pas de meurtre et le suicide de Maria est évident. La perplexité est de mise. Est-il seulement possible d'écrire un polar quand une enquête paraît aussitôt étouffée dans l'oeuf ?

Mais voilà, c'est plus fort que lui, le commissaire Erlendur, avec l'empathie qui le caractérise, se demande ce qui a pu pousser Maria à se suicider, quel profond désespoir a pu l'y contraindre. La période étant assez calme en terme d'enquêtes, il replonge aussi dans d'anciennes affaires de disparition avant que les dossiers ne soient définitivement clos. A mesure qu'il progresse, qu'il interroge, que les pièces des différents puzzles s'assemblent, Erlendur trouve comme un écho à la disparition de son frère et donc, à sa douleur personnelle. Et au lecteur d'être pris !

Cette immersion est remarquablement restituée dans la version sonore d'Hypothermie. Jean-Marc Delhausse a su trouver une voix clairement identifiable pour chacun des personnages qui ponctuent ce roman, en jouant seulement de légères inflexions. Mais ceci, je ne l'ai analysé qu'après. Pendant, je baignais dans les eaux sombres, glaçantes et inquiétantes de l'imagination d'Arnaldur Indridason.

Hypothermie, Arnaldur Indridason, traduit de l'islandais par Eric Boury, Audiolib, 9 h

16/02/2011

Le Projet Bleiberg / David S. Khara

Le Deuxième livre* de David S. Khara, Le Projet Bleiberg, est l'exemple parfait du livre remportant un franc succès grâce au bouche-à-oreille. Je ne parle pas de buzz, comme on a coutume de dire maintenant - cette opération visant à faire du bruit autour d'un produit ou d'un événement - mais bien de bouche-à-oreille. Là, le livre a été lu, il a plu et a profité, petit à petit, d'un emballement des lecteurs. Une fois qu'on l'a terminé, on se demande d'ailleurs bien comment il aurait pu en être autrement. Car ce Projet Bleiberg est vraiment, mais alors vraiment, réjouissant à lire.

Il y a tout dedans : un thriller, de l'espionnage, l'Histoire, une histoire, de l'humour, de la dérision ainsi qu'un petit côté rétro pas déplaisant pour deux sous, bien au contraire. Oui, il y a tout ceci, des éléments clairement identifiés qui, sous la patte de David S. Khara, vous font toucher à quelque chose de nouveau, goûter à une expérience littéraire d'un autre genre, populaire comme on les aime. De celle, en tout cas, qui nous fait attendre la suite avec impatience même si ce Projet Bleiberg se suffit à lui-même.

Je crois avoir dit l'essentiel, j'ai rendu compte aussi fidèlement que possible de de mon ressenti de lecteur. Hein ? Le résumé, au moins ? Je vous laisse la surprise, elle est de taille. En ce qui me concerne, là, maintenant, après avoir été une oreille, je suis une bouche... avec le sourire, en plus, c'est dire !

*: le premier étant Les Vestiges de l'aube

Le Projet Bleiberg, David S. Khara, éditions critic, 260 p.

14/02/2011

Nager sans se mouiller / Carlos Salem

Juanito Perez Perez, le narrateur ne s'est jamais posé de question ni n'a vraiment ressenti d'états d'âme quant à son métier de tueur à gages. Il est pourtant le n°3 d'une très efficace organisation secrète du crime agissant sur tous les continents. Officiellement il est un employé d'une multinationale qui prend un mois congés avec ses deux enfants dans un camping du sud de l'Espagne.

Arrivé sur place il va retrouver, comme par hasard, son ex-femme et son nouveau compagnon, un juge médiatisé bien connu pour son incorruptibilité, ainsi qu'un ancien camarade d'enfance avec lequel il a, disons, certaines dettes morales...Et la morale, il en sera beaucoup question lorsque Juanito va commencer à s'interroger sur son métier et la façon dont il va pouvoir sauver sa famille du désastre annoncé.

Dans un style très différent de son premier roman publié en français (Aller simple), Carlos Salem, joue ici avec les codes du polar pour nous entraîner sur les chemins parfois sinueux de la morale individuelle ; il pousse loin la réflexion sur la condition humaine et sur la condition de tueur qui, bien entendu ne doit pas être considérée comme une condition ordinaire.

On sent poindre des regrets chez le narrateur, certes tardifs, mais tout de même des regrets, même s'ils ne sont pas forcément formulés en tant que tel, sur un choix de vie dont la motivation première était d'échapper à la banalité.

Toute vie étant préférable à une vie ordinaire, Carlos Salem ne nous rend pas pour autant son tueur sympathique – un tueur reste tout de même un tueur –, mais il nous le rend compréhensible, ce qui n'excuse en rien l'immoralité de sa profession. Un polar mené de main de maître, remarquablement traduit, et qui tient le lecteur en haleine d'un bout à l'autre.

Gilles Moraton

Nager sans se mouiller, Carlos Salem, traduit de l'espagnol par Danielle Schramm, Actes Sud (actes noirs), 230 p.

09/02/2011

Verdict / Justin Peacock

Je crois que, dorénavant, je vais arrêter d'évoquer les mentions spéciales faites sur les livres. J'ai déjà eu l'occasion de le faire ici et bon, c'est devenu tellement agaçant et tellement courant aussi qu'il vaut mieux passer, se préoccuper de l'œuvre, même si elle est aux antipodes de ce qu'on a bien voulu nous faire croire. Quand je dis on, je parle bien sûr des éditeurs. Il paraît que c'est pas facile en ce moment, alors tout est bon apparemment pour sortir du lot. Heureusement, il arrive qu'on ait du bol et que le livre ne soit vraiment pas mauvais du tout. Comme je le répète régulièrement ici, c'est pas mal d'être surpris. C'est plutôt la pratique qui me dérange, en fait. Tenez, dernièrement dans Livres Hebdo on a eu droit à une pub : « par l'éditeur de... » à laquelle il vous suffit de rajouter le titre d'un blockbuster de la mort pour que l'affaire soit dans le sac. Pour que vous soyez déjà prêt à taper à la porte de votre libraire ou à le contacter par mail pour qu'il vous le mette de côté dès sa sortie. Tsss...

Promis, bientôt, j'arrête d'en parler de ces apâte-lecteurs. Je m'octroie juste une dernière fois avec ce Verdict de Justin Peacock où sur la première page, vous trouvez un beau : « élu thriller de l'année par le Washington post ». C'est beau, hein ? Sauf que j'ai encore beau chercher le thriller, ben je le vois toujours pas. Y'a peut-être une petite sueur froide à un moment donné quand il y a une voiture qui se fait emboutir par derrière et que... non, je ne vais tout de même pas vous dévoiler l'unique scène d'action du livre qui découle de cet accident, non ? Alors du coup, quand même je me dis, ben mon BiblioMan(u), t'es plus à la page, tu dois te gourer dans la définition du thriller, ça a peut-être évolué depuis quelque temps. Les étiquettes, c'est bien connu, tout le monde s'amuse à les déplacer dans les magasins, alors dans l'univers des livres, tu imagines. Mais avant ça, je vais voir sur le site des éditions Sonatine et je vois une toute autre mention sur la page de ce Verdict : « Elu meilleur livre de l'année par le Washington Post et le Los Angeles Times ». Ma part naïve me fait penser que ce doit être un problème de traduction à couches multiples. Parce qu'après tout, voici ce qu'ils disaient dans le Washington Post : "When the prizes are awarded for this year's best first novel, 'A Cure for Night' will be competing for the gold. » En gros, si différents chroniqueurs de ce prestigieux journal disent la même chose pour les livres qu'ils ont aimé, il ne faudra pas s'étonner si on trouve plusieurs bouquins sacrés « meilleur livre de l'année par le Washington Post »...

J'arrête... j'arrête.

Avec cette entrée en matière, vous pourriez penser que je n'ai pas apprécié Verdict de Justin Peacock. Eh bien si. A plus d'un titre. Depuis que j'ai découvert Gianrico Carofiglio et ses romans judiciaires j'ai régulièrement des bouffées d'envie de lire des histoires se déroulant dans un tribunal. J'ai bien lu un ou deux Grisham il y a bien longtemps sans être vraiment séduit . Aussi quand un nouveau nom apparaît, j'essaie de le lire. Pour voir.

Et là, c'est quand même assez bien fait. Parce qu'avec cette histoire d'avocat déchu, contraint de devenir avocat d'office après une sordide histoire de drogue qui a coûté la vie à une de ses collègues avec qui il entretenait une relation, Justin Peacock dresse un portrait assez crédible de la justice américaine dans son mode de fonctionnement. J'ai hésité à dire réaliste, mais je ne suis pas spécialiste, alors...

En tout cas l'opposition très marquée qu'il dresse entre un avocat commis d'office et de cabinet est assez intéressante. L'argent et l'ambition sont bien sûr au centre de celle-ci et Justin Peacock ne manque pas de souligner que le travail, lui reste identique. Qu'il ne s'envisage pas uniquement en terme de carriérisme. (Un petit retour sur le Coupable idéal de Jean-Xavier de Lestrade pour illustrer ceci ne peut d'ailleurs pas faire de mal). Mais l'auteur ne s'arrête pas non plus à cette seule vision. Il revient aussi à plusieurs reprises sur la notion de vérité, précisant que celle-ci n'est pas forcément capitale dans l'instruction d'un dossier, l'objectif étant parfois de lui substituer une version convaincante à même d'innocenter un prévenu. Avec ce que cela implique de problème de conscience.

Verdict se lit avec un plaisir certain, on y trouve son comptant d'objections rejetées ou retenues, les apartés avec le juge, les ajournements... des éléments attendus, connus, et qui ont l'avantage d'être mis en scène autour d'un narrateur avocat, dont les préoccupations, qu'elles soient d'ordre professionnelles ou personnelles, toutes empreintes de doutes et d'une certaine forme de fragilité, ne laissent jamais indifférent ni insensible.

Verdict, Justin Peacock, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Johan-Frederik Hel Guedj, Sonatine, 450 p.

05/02/2011

Vert Palatino / Gilda Piersanti, texte lu par Hélène Lausseur

Avec Vert Palatino s'ouvre le deuxième ouvrage consacré aux saisons meurtrières de Gilda Piersanti. En cette période de Pâques, les premiers signes du printemps se font toujours attendre. Pas de floraison, pas de soleil ni de fraîcheur mais une pluie persistante, harassante. Et des crimes aussi, qui eux n'obéissent à aucune règle préétablie. Implacables, ils drainent toujours leur lot de victimes.

En dehors de ce déluge, comme toile de fond au décor de cette deuxième enquête de Mariella De Luca, il y a Rome, encore, et puis ce championnat de football de première division pour lequel la ville entière s'oppose et vibre à l'unisson.

Fidèle à elle-même, Mariella s'investit toujours autant dans ses enquêtes, quitte parfois à marcher sur les plate-bandes des autres services de police. C'est le cas notamment pour cette affaire de disparition d'une petite fille dans le Corviale, longue barre de logements dans la périphérie de Rome. Pas de témoins directs d'un éventuel enlèvement, pas d'indice non plus. Il y a bien le meurtre récent d'un homme dont on a retrouvé des traces de trafic de pédophilie dans son ordinateur. Peut-on raisonnablement penser que les deux affaires ont un lien ?

J'ai entamé la lecture de Vert Palatino avec le plaisir de retrouver Mariella De Luca et les autres personnages qui gravitent autour d'elle. Avec le plaisir aussi d'entendre la voix d'Hélène Lausseur me raconter cette histoire. Une histoire prenante où Gilda Piersanti monte encore en puissance dans la construction de ses intrigues, dans sa manière de mettre en scène ses personnages. Et de nous confondre. Il ne s'agit plus alors seulement de plaisir car elle parvient aussi à nous remuer, à faire en sorte que le cœur cogne dans la poitrine lorsque la vérité s'esquisse, petit à petit.

Et puis tout à coup, c'est le sang qui se met à battre plus fort dans les veines lorsque cette vérité, justement, nous éclate à la figure. On peine à la croire possible, on voudrait revenir en arrière, tout effacer comme si c'était encore possible. Il faut voir là-dessous toute la force gracieuse de Gilda Piersanti : en ayant pris les tempêtes de 2001 et le championnat italien de football de l'époque, en étant très précise sur ces sujets, elle ne fait rien d'autre que resserrer de façon très étroite les liens de la fiction et de la réalité. Manière de signifier que le crime est réel, que l'abject et l'effroyable sont aussi de la partie, toujours, autour de nous.

Vert Palatino, Gilda Piersanti, Sixtrid, 1 CD MP3 (6 h 50)