Pour sauver l'ensemble des espèces vivantes, la Fraternité du Panca se voit dans l'obligation de reconstituer une chaîne Quinte. La tâche n'est pas aisée. Le Mal est là, prêt à tous les sacrifices, tous les meurtres, pour rompre le processus qui s'est enclenché avec le départ de Frère Ewen de sa planète pour Phaïstos où, conformément aux instructions qu'il a reçu, il a remis son implant vital au maillon suivant de la chaîne.
Dans ce deuxième volume - cinq sont prévus -, on suit donc le périple de Soeur Ynolde qui tente à son tour de rallier un autre membre de la Fraternité dans le système de Tau du Kolpter. En parallèle, on assiste à celui du jeune Silf, assassin du Thanaüm, dont l'ensemble des membres ont essaimé la galaxie pour enrayer la destruction de l'humanité qui incomberait à...la Fraternité du Panca.
Dans une récente interview accordée lors des Utopiales de Nantes au site Actu Sf, Pierre Bordage faisait part de la volonté qu'il avait eu d'insuffler plus de rythme à ce deuxième volume. Pari réussi, a-t-on envie de dire car c'est vrai, on se laisse facilement emporter par le récit et ce dès, le début. Il y a moins de temps mort que dans le premier tome qui m'avait surtout épaté dans sa dernière partie où l'action couvrait un nombre étendu d'années en un seul lieu, à savoir un vaisseau spatial.
Cependant, si le rythme est là ainsi que le plaisir toujours renouvelé de se laisser prendre par l'imagination de Pierre Bordage et de son talent avéré et nullement mis en doute de conteur, j'avoue être resté sur un avis mitigé au terme de ma lecture. Pour deux raisons principales dont l'une ne tient pas forcément au livre en lui-même. Je m'explique : j'ai lu beaucoup d'ouvrages de Pierre Bordage, presque tous, et il se trouve que dans celui-ci, les personnages, leurs mécanismes de pensées et de fonctionnements m'ont semblé étonnamment familiers. Comme des schémas récurrents, des clones d'autres livres et dont les intentions, qu'elles soient bonnes ou mauvaises, me sont apparues trop tranchées et prévisibles. J'en veux pour exemple le viol à répétition perpétré par le père d'un jeune homme qu'a rencontré Ynolde dans un vaisseau spatial, scène déjà lue, d'une certaine façon, et dont la principale victime se remet toujours de son traumatisme avec une rapidité surprenante. Familiarité aussi avec Silf, le jeune assassin, naïf et emprunt au doute qui s'aguerrit bien vite . Familiarité encore avec Dhuog qui, par bien des aspects m'a rappelé Abzalon.
Et puis il y a également un aspect mièvre pour le moins surprenant chez Pierre Bordage(je sais, je sais, je reviens régulièrement – trop ?- sur ces scènes qui entachent le récit par leur manque d'intérêt qu'elles leur apportent parfois, mais bon, on ne se refait pas...) : la baignade de Dhuog où Ynolde peut apercevoir ses muscles rouler sous sa peau, la déclaration d’amour avec ce " dès le premier instant où je t’ai vue "… de trop, à mon sens, pas vraiment nécessaire.
Fort heureusement, mis à part ces déconvenues, on ne peut par ailleurs qu’être ébloui par un bestiaire exceptionnel, les mondes visités, les villes traversées, les coutumes et l’Histoire de chaque peuplade que l’on découvre en même temps que les protagonistes de cette histoire. Alors là, pour la peine, l’originalité est là, bien là et on en prend plein les mirettes, comme on dit.
A mettre également au crédit ce deuxième volume, la distance prise par rapport à ce que l’on a l’habitude de lire dans ces histoires où le manichéisme est devenu monnaie courante. Ici, si les axes sont effectivement bien distincts, il n’en reste pas moins que les personnages sont tour à tour soumis au doute, à la remise en question, et enclins au renoncement. Pour des raisons qui sont propres à chacun. Le personnage de Silf est sans doute le plus représentatif de cette nuance apportée à la lutte du Bien contre le Mal, car depuis le début, il est conditionné pour tuer, pour obéir coûte que coûte, en aveugle. Et pourtant, on ne le considère jamais véritablement comme un assassin mais comme un garçon embarqué bien malgré lui dans une odyssée qui le dépasse et dont il se tire à merveille…
Déception d’un côté, emballement d’un autre, espérons que le troisième tome saura nous surprendre avec Frère…hé, comptez pas sur moi pour vous dévoiler son identité ! Non mais…
2 commentaires:
On est en train d'en discuter avec Val sur ma chronique, et ta bonne connaissance des oeuvres de Bordage apporte un éclairage supplémentaire. Je n'avais pas vu ces schémas récurrents dans les caractéristiques des personnages.
En revanche, le plaisir de lecture est toujours là !
Je viens tout de suite sur ton blog !
Enregistrer un commentaire