08/02/2013

Player One / Ernest Cline


Il est possible que vous vous trouviez un jour avec des personnes ayant vécu de plein fouet les années 80, que ces personnes aient baigné, enfants ou ados, dans cette culture qui a... comment dire... laissé des traces. Il est probable également que vous vous trouviez avec ces personnes le jour même où – cela arrive une fois l'an en moyenne – ils y vont de leur soirée revival, saupoudrée de références de films ou de séries, agrémentée de souvenirs de parties de jeux vidéos épiques, farcie jusqu'à l'indigestion de chansons de variétés et de dessins animés cultes. La soirée avançant, les classiques ayant suscité jusqu'à des sifflements bizarres dans vos oreilles, le jeu consiste alors à trouver des pépites oubliées, lesquelles une fois verbalisées arrachent des cris extatiques ou des onomatopées d'une autre planète aux personnes vous entourant. Se voir ainsi propulsé des années en arrière peut en effet provoquer des comportements pour le moins étranges. Là encore, vos oreilles en sont pour leur frais.

Ernest Cline, auteur du livre Player One, sorti en fin du mois de janvier, a dû vivre une de ces soirées. Plusieurs même. Ça ne fait aucun doute. Impossible, à la lecture du livre, d'imaginer qu'il ne s'y soit pas adonné avec une ferveur presque mystique. Son âge est à ce titre assez révélateur...

2044, rien ne va plus sur Terre. Une grande partie de la population mondiale a préféré se réfugier dans une réalité virtuelle, l'OASIS, plutôt que de subir les affres du quotidien, cumulant conditions climatiques désastreuses et inégalités sociales jamais atteintes. Dans l'OASIS, dans l'étendue presque sans limite qu'elle suppose, Je peut être un autre, et tout se révéler possible... ou facticement possible. Le créateur de cet univers à nul autre pareil, James Halliday, est décédé voici quelques années, sans héritier à qui léguer sa fortune colossale. Aussi a-t-il décidé de lancer une chasse singulière : celui qui saura trouver l'Oeuf caché dans l'OASIS remportera le gros lot, se montant à plusieurs milliards de dollars. Pour ce faire, il faudra résoudre bon nombre d'énigmes relatives aux années 80 dont il était fan (euphémisme quand tu nous tiens!), et dénicher trois clés ouvrant chacune un portail virtuel. Wade Watts alias Parzival est de la partie et n'en revient pas lui-même lorsque, à dix-huit ans, il est le premier à mettre la main sur l'une d'entre elles.

Ce n'est indiqué nulle part sur le livre mais il convient de le savoir, Player One s'adresse à un public de jeunes lecteurs ou aux nostalgiques des années 80. Le problème c'est que je doute que les jeunes lecteurs actuels s'intéressent vraiment aux nombreuses et vieilles références citées dans le livre, hormis dans un souci de curiosité. La plupart d'entre elles leur passeront au-dessus de la tête à moins de prendre constamment des notes et de les répercuter ensuite sur un moteur de recherche. Quant aux nostalgiques des années 80, qui auraient peut-être vu là une occasion de s'éviter une énième soirée revival où il auraient certes pu briller - pour avoir pris des notes la fois précédente -, tous ne seront certainement pas sensibles à la tonalité trop young adult du récit.

Qui plus est, on trouvera dans Player One des considérations malheureusement déjà vues et revues, mais surtout mieux vues et revues ailleurs. Ici, tout paraît bien gentillet et naïf dans la représentation de la Réalité opposée au monde virtuel (c'en est presque comique de voir le concepteur de l'OASIS affirmer que rien ne vaut la VRAIE vie quand lui-même a vécu comme un reclus dans son propre univers... pince-moi je rêve!), ou bien même dans l'approche de l'identité, de l'image que l'on renvoie aux autres et du souci que l'on peut y apporter, dans la crainte d'un rejet.

Personnellement, à part retrouver des références de films et de jeux vidéos (qui m'ont permis de bien rire en visionnant Le joueur du grenier), l'intérêt s'est émoussé au fil de cette histoire bizarrement trop linéaire et sans surprise, où les gentils sont bien gentils, les méchants bien méchants, et qui s'avère finalement assez décevante. 

Player One, de Ernest Cline, traduitn de l'américain par Arnaud Regnauld, Michel Lafon, 2013, 407 p.
CITRIQ

3 commentaires:

SBM a dit…

Je vais le tenter quand même et on verra si l'effet revival agit sur moi (cure de Jouvence ?).

BiblioMan(u) a dit…

La matière est là en tout cas ! :)

Anonyme a dit…

BiblioManu vous êtes trop beau!!! Que dites-vous? vous allez censurer mon commentaire???!! <3