15/09/2012

Cal de Ter, intégrale 1 / Paul-Jean Hérault


La rencontre avec Cal de Ter aurait pu se produire plus tôt. Je veux dire, en 1975, quand le premier titre de la série est paru dans la mythique collection Anticipation chez Fleuve noir. Seulement voilà, en 1975, je baignais encore dans mes langes...

Malgré le travail remarquable de La Rivière Blanche où figurent plusieurs titres de Paul-Jean Hérault à leur catalogue et malgré aussi une tentative ratée avec Millecrabe (paru aux éditions Interkeltia), titre pour lequel le manque de relecture éditoriale et une typographie calamiteuse avaient eu raison de ma patience, malgré tout ceci, donc, il m'aura fallu attendre 2012 pour succomber à la curiosité. Le début d'année a en effet vu refleurir un peu partout le nom de l'auteur en librairie, à travers plusieurs rééditions dignes d'intérêts : Gurvan aux éditions Critic et Cal de Ter, donc, chez Milady, qui regroupe pas moins de trois romans : Le Rescapé de la Terre, Les Bâtisseurs du monde et La planète folle.

Après que les humains ont finalement trouvé le moyen de mettre définitivement la Terre en péril, un certain Guise installe Cal en état d'hibernation dans la capsule d'un vaisseau spatial, lequel Cal se réveille quelques milliers d'années plus tard aux abords d'une planète s'avérant habitable. Il s'installe, planque ses affaires – mieux vaut être prudent – et commence son exploration. Assez rapidement, il découvre un peuple pacifique fascinant, les Vahussis. Bien décidé à s'intégrer auprès de ces personnes qu'il prend en affection, Cal ne peut néanmoins s'empêcher de contribuer à leur bien-être en leur délivrant le fruit de ses connaissances terriennes. Mais à trop vouloir jouer les bons samaritains, cela peut entraîner quelques... menus problèmes, surtout quand s'offre à vous la possibilité de mesurer l'ampleur d'une évolution à l'échelle de plusieurs siècles.

L'histoire de Cal est du genre tumultueuse, exotique, aventureuse... multiple. Et ça ne fait pas de mal de goûter à de la Science-fiction de cette trempe là. Il y a bien là-dedans un petit côté suranné – ça sent bon la SF à papa – mais cela n'enlève en rien le plaisir que l'on en retire à la lecture, bien au contraire. C'est d'ailleurs en lisant cet ouvrage que j'ai d'une certaine façon pu imaginer la passion qui anime Laurent Genefort autour de cette science-fiction d'une autre époque, dont il n'a de cesse de favoriser à nouveau la lecture en travaillant à sa réédition auprès de différents éditeurs.

Peu importe ici la véracité scientifique – j'imagine que les dents de certains doivent grincer –, ce qui retient surtout l'attention, ce sont les situations rencontrées par Cal dès son entrée en piste sur cette planète sensiblement proche de la nôtre. Ce personnage livré à lui-même – un peu à la manière de Adam Reith dans le cycle de Tschaï de Jack Vance – confronté à toutes sortes d'aventures dont il se fera le fer de lance, impose la figure d'un Héros fort, inébranlable, intrépide et armé de bonnes intentions, qu'on croirait tout droit sorti d'un pulp.

De fait, si cette image est intéressante et donne sa tonalité au livre, Cal n'est pas sans agacer parfois, notamment dans son manie de vouloir jouer au Dieu (avis aux nostalgiques, le récit, allez savoir comment, m'a rappelé le jeu Populous sur Amiga) : je sais ce qui est bon pour vous, je m'institue maître de votre destin, je connais la voie de la sagesse même si mes frères terriens et moi avons contribué à notre perte, mais après tout peu importe. Première leçon pour favoriser l'esprit d'équipe et aller ensemble de l'avant, je vais vous apprendre à jouer au football (!).

Cal comme facteur d'évolution ? Cela prête à sourire mais cet aspect des choses, face à la richesse du livre et des péripéties dont il se fait l'écho dans ce premier tome, ne représente pas un frein à la lecture.

Entre Planet opera, Ethno-fiction, Aventure et Fantasy, le mélange aurait facilement pu s'avérer indigeste, il ne fait que mettre en appétit. Ça tombe bien, l'intégrale tome 2 est déjà parue. Quant à la troisième, elle devrait voir le jour au premier trimestre 2013. Dans l'intervalle, les lectures ne manqueront pas pour patienter...

Les premières lignes, celles qui, en librairie, ont motivé mon acquisition :

Dans l'espèce de tube transparent où il repose, nu, le corps de l'homme est impressionnant de blancheur. Celle des cadavres. Ses cheveux, châtain très clair, presque blonds, ont poussé, mais leur éclat est tout de même encore trop vif pour être ceux d'un mort.
Le bruit d'un déclic vient rompre le silence pesant. Pas un bruit sec de machine bien entretenue, plutôt celui, hésitant, d'un appareillage qui fonctionne toujours, certes, mais avec un poil de retard. Dans une armoire murale un bourdonnement naît et, peu à peu, une horlogerie étonnante met en œuvre une multitude de cadrans qui s'éclairent.
Une sorte de gelée verdâtre glisse dans le tube transparent et vient recouvrir les pieds de l'homme, montant peu à peu vers son visage d'où s'échappent des dizaines de fils collés à la peau par une goutte d'un liquide durci. Insensiblement, comme la marée d'un océan, la gelée s'anime d'un mouvement de flux et de reflux qui s'accélère jusqu'à devenir nettement perceptible à l'œil.
Les heures passent...

Cal de Ter. Intégrale 1, de Paul-Jean Hérault, Milady, 2012, 593 p.
CITRIQ

4 commentaires:

Lorhkan a dit…

Cette "SF à papa" comme tu dis me tente bien. De la SF qui fait du bien par ou ça passe, pas forcément très ambitieuse, mais surtout faite pour passer un agréable moment dépaysant et divertissant, que demander de plus finalement ?

BiblioMan(u) a dit…

C'est exactement ça ! Un agréable et divertissant moment. Tu peux donc largement te laisser tenter ;)

Blop a dit…

Ca me fait saliver. Ce type de SF peut s'avérer agaçant (surtout avec le héros - forcément un homme, ce qui a tendance à me faire monter sur mes grands chevaux - sans peur et sans reproche et qui a toujours raison) mais enfin, du bon space op, c'est comme le pain au chocolat après la prise de sang à jeune : ça fait du bien par où ça passe...

BiblioMan(u) a dit…

Alors là, en matière de héros qui fait preuve d'une assurance exacerbée, tu vas être servi, mais ça correspond tellement bien à une époque et à un type de SF qu'on prend tout... ou rien. Et oui, ça passe bien, surtout si avant tu t'es payé un gros pavé sans "aération"...