Si je
vous parle tout à coup d'une combi Waders, de monter une Adams en 16, d'une Olive
Soft Hackle ou d'une Serendipity, il est fort probable que des points
d'interrogation vont éclore au dessus de vos têtes. Ou bien vous
aurez tout simplement compris qu'il va sans doute être question
de pêche dans La Rivière de sang.
Parce
qu'il n'y a pas que Joe Pickett dans la vie, ni le très regretté
Stoney Calhoun, on va cette fois-ci s'offrir une petite virée avec
Dahlgren Wallace, ancienne star du football américain, vétéran de
la guerre du Golfe et actuel guide de pêche pour le compte de Fred
Lather, le propriétaire, dit-il, de la « plus grosse chaîne
d'info du monde ». Ce dernier s'est fait un petit plaisir en
achetant un ranch dans les terres très étendues du Montana, dont
les terres très étendues suscitent bien des convoitises. Les
fonctions de Dahlgren sont simples. Il doit amener les invités de
marques de Lather à la pêche, les guider, leur montrer les plus
beaux coins et leur sortir le «satané putain de grand jeu »
dans le but de les éblouir. Au moment où commence cette histoire il
emmène justement un couple de mormons californiens richissimes.
Manque de bol, Dahlgren déteste les mormons et les californiens.
Manque de bol bis, l'homme qu'il est chargé d'accompagner est
assassiné dans le bras d'une rivière reculée. Je vous laisse
deviner qui va être suspecté en premier.
Alors,
alors, alors... J'aurais bien du mal à vous dire ce que j'ai préféré
dans ce roman. La Rivière de sang tire toute sa force et son impact
de l'ensemble des éléments qui le constituent. A savoir les grands
espaces, cette nature dévoilée, cet appel au calme et au silence
cependant brisé par des hommes trouvant toujours le moyen de tout
ramener à des considérations mercantiles.
Il y a
aussi tous les ingrédients d'un polar efficace dont le rythme est
loin d'être indolent. Quand on parle de pêche on aurait tendance à
croire que tout se passe dans une lente contemplation. C'est loin
d'être le cas. Les personnages brillent de leur présence, révélés
tous autant qu'ils sont par un sens du dialogue aussi vif que
percutant. Et puis il y a l'humour, aussi, qui finit de faire de La Rivière
de sang un bon et grand polar. Il faut voir toute la dérision dont
fait preuve Jim Tenuto à l'égard des miliciens néo-nazis, des
éco-terroristes protecteurs d'animaux, des ranchers avides, tous
prêts à suggérer sans trop se mouiller non plus, attention, qu'ils
sont à l'origine du meurtre. Il faut voir cette relation
particulière que noue Dahlgren avec un agent du FBI faisant office
d'ange gardien, comme il faut entendre, enfin, les répliques cinglantes et
dévastatrices fusant de la bouche de notre héros lors de réunions
de ranchers.
Alors
ce sont des mots tout prêts, tout mâchés, bon à utliliser pour
n'importe quel chroniqueur emballé par un ouvrage mais puisqu'ils
sont là et qu'ils reflètent une réalité, j'aurais bien tort de
m'en priver : en ce qui concerne La Rivière de sang, le
cocktail est explosif et dépasse toutes les attentes. Aussi, avant
que Jim Tenuto ne nous livre une nouvelle aventure de Dahlgren
Wallace, n'hésitez pas à piocher dans le catalogue Gallmeister. On
n'est pas loin de toucher à du « à tous les coups on gagne »...
La Rivière de sang, de Jim Tenuto, traduit de l'américain par Jacques Mailhos, Gallmeister (Totem), 2010, 336 p.
6 commentaires:
voilà une chronique qui donne bien envie de lire ce bouquin et de découvrir cet auteur. Il me semble en plus avoir le livre dans ma bibliothèque, faut juste que je trouve le temps ! :)
J'ai bien bien hâte que la deuxième aventure de Dahlgren paraisse enfin. Mais je me dis aussi que plus il prend son temps, mieux c'est... En tout cas, celui-ci aura de quoi te plaire, sans doute possible ;)
Ok, je suis convaincue ! je le mets dans mon panier... merci collègue !
PS : à quand la photo à poil avec les bouquins ? ;)
Avec plaisir !
Pour les photos, j'essaie de convaincre les collègues, pas facile, je t'assure. Et puis, il faut que je passe par une phase de... de comment dire... d'allègement...
en lisant ton billet, je me dis que j'ai bien été bête de m'arrêter au milieu du bouquin. Oui je sais j'abuse, mais j'ai eu du mal à croire à certaines scènes. certainement à reprendre...
tsss...tssss...tsss ;) Je crois me souvenir à quelles scènes tu fais allusion. Je n'y avais pas prêté plus de cas que ça mais à tout bien considérer, je comprends qu'elles puissent interpeler. Pour ma part, elles m'ont parues s'inscrire dans une sorte de pacte passé avec le lecteur...
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