Kenny n'en a plus pour longtemps. Il le sait. Le verdict est tombé, implacable : tumeur au cerveau. A tout casser, il en a pour six semaines. Autant dire, très peu de temps. Plutôt que de succomber à l'abattement ou à la colère, Kenny décide de dresser la liste des personnes qu'il a déçues d'une façon ou d'une autre, d'aller à leur rencontre et trouver les mots pour leur dire combien il regrette, combien il les aime, combien elles ont été importantes à ses yeux. Parmi elles, il y a Callie Barton. Callie, il l'a connue au collège, puis il l'a perdue de vue. Il demande alors à une de ses amies, inspectrice à la retraite, de retrouver sa trace. Tâche difficile car même la police s'est cassée les dents sur l'affaire Callie Barton. Celle-ci a en effet disparue de la circulation du jour au lendemain. Son mari, Jonathan a un temps été suspecté, de sérieux doutes ont pesé sur lui. Il l'avait déjà battue. Mais faute de preuves et de corps, l'affaire a été classée. Kenny, lui, est persuadé de la culpabilité de Jonathan et va tout mettre en œuvre pour le prouver, malgré le peu de temps qu'il lui reste. Et c'est justement ce temps qui lui manque, s'enfuit à toute vitesse, qui va le pousser à commettre l'irréparable, amener les deux hommes à s'affronter, se confronter dans un rapport de force pour le moins inégal et violent. Aux dépends des uns, des autres, et de ses proches en particulier...
Captif est un roman qui se lit vite et bien. Police conséquente, interligne prononcé, marges importantes. Les phrases sont courtes, basiques dans leur construction. Le sujet, verbe, complément est de rigueur. Personnellement je n'ai rien contre, c'est parfois dans la sobriété que les mots révèlent toute leur portée, qu'ils claquent, percutent, ou trouvent la voie de la justesse, quand ce n'est pas tout cela à la fois. Cela dépend du contexte. Du style, aussi. Captif a un peu manqué le coche de ce point de vue là. Peut-être justement parce que tout va trop vite, que les intentions de Kenny se révèlent - à peine - dans la précipitation. Il n'y a pas de gradation réellement perceptible dans sa colère, dans la violence de ses actes, dans l'ambivalence de sa morale, de ce qu'il pense être juste ou pas. Tout s'opère sans vraiment de nuances, ce qui a pour conséquence directe de mettre le lecteur en retrait, de couper net la voie de l'empathie. Et à un ou deux près, il en va de même pour les autres personnages, non pas qu'ils se soient révélés trop caricaturaux, mais juste sans chair et sans saveur, comme désincarnés. Neil Cross a beau leur faire exprimer la douleur, la peine, le dégoût, le désespoir, ces sentiments ne résonnent ni n'éclatent jamais en nous. Finalement, on glisse dessus comme sur ce roman qui ne devrait pas me laisser un souvenir impérissable.
Captif, Neil Cross, traduit de l'anglais (Grande-Bretagne) par Renaud Morin, Belfond (Belfond noir), 350 p.
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