La
rencontre avec Cal de Ter aurait pu se produire plus tôt. Je veux
dire, en 1975, quand le premier titre de la série est paru dans la
mythique collection Anticipation
chez Fleuve
noir. Seulement voilà, en 1975, je baignais encore dans mes
langes...
Malgré
le travail remarquable de La
Rivière Blanche où figurent plusieurs titres de Paul-Jean Hérault à leur catalogue et malgré aussi une tentative ratée
avec Millecrabe (paru aux éditions Interkeltia), titre pour lequel
le manque de relecture éditoriale et une typographie calamiteuse
avaient eu raison de ma patience, malgré tout ceci, donc, il m'aura
fallu attendre 2012 pour succomber à la curiosité. Le début
d'année a en effet vu refleurir un peu partout le nom de l'auteur en
librairie, à travers plusieurs rééditions dignes d'intérêts :
Gurvan
aux éditions Critic
et Cal
de Ter, donc, chez Milady,
qui regroupe pas moins de trois romans : Le Rescapé de la
Terre, Les Bâtisseurs du monde et La planète folle.
Après
que les humains ont finalement trouvé le moyen de mettre
définitivement la Terre en péril, un certain Guise installe Cal en
état d'hibernation dans la capsule d'un vaisseau spatial, lequel Cal
se réveille quelques milliers d'années plus tard aux abords d'une
planète s'avérant habitable. Il s'installe, planque ses affaires –
mieux vaut être prudent – et commence son exploration. Assez
rapidement, il découvre un peuple pacifique fascinant, les Vahussis.
Bien décidé à s'intégrer auprès de ces personnes qu'il prend en
affection, Cal ne peut néanmoins s'empêcher de contribuer à leur
bien-être en leur délivrant le fruit de ses connaissances
terriennes. Mais à trop vouloir jouer les bons samaritains, cela
peut entraîner quelques... menus problèmes, surtout quand s'offre à vous la possibilité de mesurer l'ampleur d'une évolution à l'échelle de plusieurs siècles.
L'histoire
de Cal est du genre tumultueuse, exotique, aventureuse... multiple.
Et ça ne fait pas de mal de goûter à de la Science-fiction de
cette trempe là. Il y a bien là-dedans un petit côté suranné –
ça sent bon la SF à papa – mais cela n'enlève en rien le plaisir
que l'on en retire à la lecture, bien au contraire. C'est d'ailleurs
en lisant cet ouvrage que j'ai d'une certaine façon pu imaginer la
passion qui anime Laurent
Genefort autour de cette science-fiction d'une autre époque,
dont il n'a de cesse de favoriser à nouveau la lecture en
travaillant à sa réédition auprès de différents éditeurs.
Peu
importe ici la véracité scientifique – j'imagine que les dents de
certains doivent grincer –, ce qui retient surtout l'attention, ce
sont les situations rencontrées par Cal dès son entrée en piste
sur cette planète sensiblement proche de la nôtre. Ce personnage
livré à lui-même – un peu à la manière de Adam Reith dans le
cycle de Tschaï de Jack Vance – confronté à toutes sortes
d'aventures dont il se fera le fer de lance, impose la figure d'un
Héros fort, inébranlable, intrépide et armé de bonnes intentions,
qu'on croirait tout droit sorti d'un pulp.
De
fait, si cette image est intéressante et donne sa tonalité au
livre, Cal n'est pas sans agacer parfois, notamment dans son manie de
vouloir jouer au Dieu (avis aux nostalgiques, le récit, allez savoir
comment, m'a rappelé le jeu Populous sur Amiga) : je sais ce qui
est bon pour vous, je m'institue maître de votre destin, je connais
la voie de la sagesse même si mes frères terriens et moi avons
contribué à notre perte, mais après tout peu importe. Première
leçon pour favoriser l'esprit d'équipe et aller ensemble de
l'avant, je vais vous apprendre à jouer au football (!).
Cal
comme facteur d'évolution ? Cela prête à sourire mais cet
aspect des choses, face à la richesse du livre et des péripéties
dont il se fait l'écho dans ce premier tome, ne représente pas un
frein à la lecture.
Entre
Planet
opera, Ethno-fiction,
Aventure et Fantasy, le mélange aurait facilement pu s'avérer
indigeste, il ne fait que mettre en appétit. Ça tombe bien,
l'intégrale tome 2 est déjà parue. Quant à la troisième, elle
devrait voir le jour au premier trimestre 2013. Dans l'intervalle,
les lectures ne manqueront pas pour patienter...
Les
premières lignes, celles qui, en librairie, ont motivé mon acquisition :
Dans
l'espèce de tube transparent où il repose, nu, le corps de l'homme
est impressionnant de blancheur. Celle des cadavres. Ses cheveux,
châtain très clair, presque blonds, ont poussé, mais leur éclat
est tout de même encore trop vif pour être ceux d'un mort.
Le
bruit d'un déclic vient rompre le silence pesant. Pas un bruit sec
de machine bien entretenue, plutôt celui, hésitant, d'un
appareillage qui fonctionne toujours, certes, mais avec un poil de
retard. Dans une armoire murale un bourdonnement naît et, peu à
peu, une horlogerie étonnante met en œuvre une multitude de cadrans
qui s'éclairent.
Une
sorte de gelée verdâtre glisse dans le tube transparent et vient
recouvrir les pieds de l'homme, montant peu à peu vers son visage
d'où s'échappent des dizaines de fils collés à la peau par une
goutte d'un liquide durci. Insensiblement, comme la marée d'un
océan, la gelée s'anime d'un mouvement de flux et de reflux qui
s'accélère jusqu'à devenir nettement perceptible à l'œil.
Les
heures passent...
Cal de Ter. Intégrale 1, de Paul-Jean Hérault, Milady, 2012, 593 p.
4 commentaires:
Cette "SF à papa" comme tu dis me tente bien. De la SF qui fait du bien par ou ça passe, pas forcément très ambitieuse, mais surtout faite pour passer un agréable moment dépaysant et divertissant, que demander de plus finalement ?
C'est exactement ça ! Un agréable et divertissant moment. Tu peux donc largement te laisser tenter ;)
Ca me fait saliver. Ce type de SF peut s'avérer agaçant (surtout avec le héros - forcément un homme, ce qui a tendance à me faire monter sur mes grands chevaux - sans peur et sans reproche et qui a toujours raison) mais enfin, du bon space op, c'est comme le pain au chocolat après la prise de sang à jeune : ça fait du bien par où ça passe...
Alors là, en matière de héros qui fait preuve d'une assurance exacerbée, tu vas être servi, mais ça correspond tellement bien à une époque et à un type de SF qu'on prend tout... ou rien. Et oui, ça passe bien, surtout si avant tu t'es payé un gros pavé sans "aération"...
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